Piloter son budget comme un pro

Dépasser sa comptabilité pour accéder au pilotage!

Non, la comptabilité ne sert pas qu’à faire de l’administratif

Que nous soyons société du CAC 40 ou petite association de quartier on doit tenir une comptabilité. Certes cette dernière sera plus ou moins complexe que l’on ait à demander une subvention de 1000€ pour des boules de pétanque ou à fournir des états financiers aux actionnaires de monde entier. 

Néanmoins la comptabilité est toujours perçue comme un fardeau, une formalité légale et administrative qui n’apporte que peu de valeur ajoutée. Car la comptabilité ne donne qu’une photo uniformisée de la situation financière d’une organisation.

Cependant, la comptabilité peut servir de socle au pilotage financier. Pour cela il faut se demander de quoi nous avons besoin avant de passer aux deux étapes à suivre pour passer au poste de pilotage.

Le pilotage, pour qui? Pour quoi?

Je veux bien piloter mais pourquoi? Il y a plusieurs objectifs et chacun orientera l’agencement de votre poste de pilotage.

•  Je veux savoir si mon organisation fera un bénéfice ou des pertes en fin d’année
• Je veux savoir si tel pôle, telle action, manifestation a été rentable? Si j’ai su équilibrer mes ressources avec mes coûts.
• Je veux savoir pourquoi mon budget dérape.
• Je veux savoir quels sont mes coûts et à quelles recettes participent-ils.

Les deux solutions: la comptabilité d’engagement et le contrôle de gestion

Pour répondre à vos attentes il existe deux pistes principales.

•  La comptabilité d’engagement vous permet de prévoir vos dépenses, de suivre leur réalisation et de veiller à ce que vos charges ne dérivent pas de votre prévisionnel.
• Le contrôle de gestion vous permet de visualiser votre comptabilité comme un organisme vivant. Vous verrez quelles charges concourent à quels résultats, comment sont affectées les ressources et si des activités sont plus rentables que d’autres.

La comptabilité d’engagement

Pour la mettre en œuvre vous devez récupérer votre comptabilité de l’année passée, tous vos contrats d’eau, électricité, abonnements…

Saviez-vous qu’au 1er janvier vous pouviez prédire 80% de vos frais et plus de 90% de vos charges si vous prenez en compte les salaires?

Oui, dès le premier jour de l’année vous pouvez prévoir l’immense majorité de vos charges. 

Dans un tableau vous devez lister tous vos contrats, abonnements, assurances, locations… Tout ce qui est prévisible. Vous vous poserez la question de savoir si ces frais vont augmenter ou baisser en cours d’année: nouveaux forfaits télécoms moins cher, changement d’assurance…

Dans un tableau à 12 colonnes pour les 12 mois de l’année vous allez répartir vos charges. Vous pouvez tout mettre, y compris les frais de personnel. Vous pouvez y ajouter les frais dont vous avez connaissance: révision de véhicule, achat programmé…

Chaque mois vous pourrez alors suivre la réalisation de votre plan. Vous verre alors quels postes de charge dévient du prévisionnel et surtout quel impact cela aura à la fois sur votre résultat et sur votre trésorerie. Avec cet outil vous pourrez corriger le tir en cours d’année et prévoir vos rendez-vous avec votre banquier pour prévenir les décalages de trésorerie. Car il vaut mieux négocier un petit découvert que de se retrouver avec les comptes bloqués.

Le contrôle de gestion et la méthode ABC/M

Ici je veux piloter plus finement mes différents projets. Je veux savoir ce qui m’est profitable et ce qui me plombe dans mon organisation. Le contrôle de gestion est très utile si j’ai plusieurs activités. Par exemple si je fais 2 manifestations dans l’année, je veux savoir si l’une ne finance pas les frais de l’autre.

La méthode ABC est très simple dans son approche. Elle place tout en haut les activités. Tout le reste du travail consistera à raccrocher les produits et charges à ces coûts.

• Lister ses activités: rien de plus simple, je liste mes projets, manifestations, activités, points de vente… Ce que je veux suivre, piloter.
• Rattacher les charges directes: dans la comptabilité certaines charges sont directement rattachées à mon projet. Si j’ai loué un stand pour une manifestation alors 100% de la facture sera comptée dans ma manifestation.
• Lisser les charges indirectes: certaines charges participent à toutes les activités ou à plusieurs: par exemple ma consommation en eau ne peut être allouée à un seul projet (sauf si j’ai une jardinerie). Pour répartir ces charges j’ai deux solutions:
  • le prorata: je divise ma charge par le nombre de projets et j’affecte le montant brutalement. C’est simple, efficace mais peu précis. Je peux faire des cotes mal taillées, au doigt mouillé je peux estimer qu’une charge est plus consommée par telle ou telle activité.
  • L’allocation fine: je vais construire des hypothèses me permettant de répartir ces charges. Pour cela je repars de mes activités. Je vais estimer quelle est la clé d’allocation la plus pertinente: le m², le % de chiffre d’affaires, le nombre de personnes travaillant dans cette activité… Oui j’ai bien dit le m², en effet si j’ai 3 activités mais que mon magasin prend 80% de ma surface, il est logique de décréter que mon loyer est à 80% utilisé par le magasin, de même pour l’eau et l’électricité.
• Affecter les frais de personnel. Il faut prendre le salaire brut chargé du personnel. Puis il va falloir le répartir dans les différentes activités.
  • Cas général: j’affecte mes personnes au pourcentage du temps qu’ils passent (idéalement à l’année, mais au mois ça passe) sur un projet. Par exemple mon vendeur passe 80% de son temps en magasin, 15% de son temps en livraison et 5% de son temps en salons et marchés.
  • C’est bien beau mais mon comptable j’en fais quoi? Il faut bien affecter aussi les fonctions que l’on appelle transverses. Comptables, directeurs, RH… tous représentent des charges mais n’appartiennent pas à une activité en particulier. Dans ce cas, la méthode ABC prévoit de répartir leurs salaires dans toutes les activités. Pour aller encore plus loin on peut aussi pondérer leur salaire avec une hypothèse de répartition. En effet si 80% de mes ressources ou de mes charges viennent d’un seul projet, il est fortement possible qu’en tant que directeur je doive allouer 80% de mon temps à piloter cette activité… donc 80% de mon salaire passe dans cette activité.

Au final je dispose d’une vision claire de mon organisation, où sont mes coûts, où sont mes ressources. Je peux voir ce qui tire mon organisation vers le haut ou ce qui me plombe. Je peux piloter!

A vous de jouer!

Maintenant il reste le plus dur à faire: rattacher sa comptabilité à son poste de pilotage. Dans les organisations simples, la tâche peut être aisée et faite à la main sur Excel. Certains logiciels de comptabilité permettent de faire de l’engagement.

Mais maintenant que vous percevez la puissance de ces outils, pourquoi ne pas en parler à votre comptable… ou me demander ce qu’il est possible de mettre en place chez vous. Il existe forcément une solution à vos besoins et celle-ci ne demande pas de diplômes poussés ou d’être ingénieur pour les utiliser.